Vous ne l’aviez pas demandé, le ministère de la Justice l’a fait !
Déclaration liminaire de la CFDT au comité social ministériel (CSM) Justice du 27 novembre 2025
Voilà quel est l’adage qui pourrait être répété aux agents par leur employeur.
Il va de pair avec une citation que certains reconnaitront et qui est aujourd’hui criante de réalisme pour les agents du ministère de la Justice :
« Dites-nous ce dont vous avez besoin, nous vous dirons comment vous en passer ».
C’est ce qu’inspire à la CFDT l’ordre du jour du CSA ministériel du 27 novembre avec ses 3 points.
Quels sont les sujets qui ne sont toujours pas traités par le ministère de la Justice ?
Voici la liste (non exhaustive malheureusement) des sujets récurrents qui ne sont toujours pas traités par le ministère de la Justice ou les réponses tardent :
- Réforme des Directeurs des Services de Greffe Judiciaires, le CSA ministériel du 4 décembre est enfin programmé ;
- Cartographie RIFSEEP des corps communs et rattrapage des mesures pour les corps spécifiques ;
- Normes de prise en charge à la PJJ, aucune nouvelles mais des annonces hier sur les centres éducatifs fermés encore une fois non concertées ;
- Revalorisation de la filière sociale demandée par la CFDT en décembre 2024 et sans réponse à ce jour ;
- Mise en œuvre de la filière technique, toujours aucune nouvelle ;
- Développement d’outils numériques adaptés ;
- etc.
Et malgré ces sujets toujours en cours, il suffit d’une idée lancée par le ministre pour que naissent une direction générale de l’administration pénitentiaire et une inspection propre à l’administration pénitentiaire.
Quelle efficacité de réaliser cela en quelques mois alors que tant d’autres sujets sont au point mort depuis des années !
En plein marasme budgétaire, qui est le troisième point de l’ordre du jour, le ministère de la Justice propose cette création sans aucune réflexion aboutie et en l’absence totale de concertation.
L’objectif en lui-même n’est pas clair. Comme beaucoup d’autre réorganisations au sein de ce ministère, seuls quelques hauts responsables vont en bénéficier financièrement en étant dotés de nouveaux titres brillants et ronflants.
Au ministère de la Justice, on organise, on réorganise mais dans quel but à part faire marcher l’imprimerie pour les cartes de visites ?
Et en parlant d’imprimerie auriez-vous retrouvé la planche à billets ?
Alors que partout on dit aux agents de se serrer la ceinture pour participer à l’effort national sur le budget, à la DAP on trouve les moyens de revaloriser certains hauts responsables. Quelle cohérence ?
L’urgence était-elle à ce niveau quand les agents ont l’impression que depuis la création des quartiers dédiés à la lutte contre la criminalité organisée, la plupart des moyens semblent concentrés sur ces derniers.
Pendant ce temps, les établissements pénitentiaires suffoquent sous la surpopulation, le manque d’effectifs et la montée des violences.
Les personnels n’en peuvent plus. Ils aiment leur métier, mais ils n’arrivent plus à l’exercer dignement. La fatigue devient chronique, le découragement s’installe, et le sens du travail se perd.
-> Pour la CFDT, il est urgent d’écouter, d’agir, et de redonner souffle à celles et ceux qui font vivre nos services chaque jour. Car sans eux, rien ne tient. Et c’est tout un système qui s’effondre, dans le silence de ceux qu’on ne veut pas entendre.
Que penser d’une internalisation de l’application des peines souhaitée dans le cadre des EGIP ?
Dans un contexte où les personnels cadres et non cadres ne sont pas défendus comme il se doit par l’administration, cette volonté apparait désormais clairement plus comme étant un moyen de réguler les flux pénitentiaires, que de faire reconnaitre le professionnalisme et l’expertise des agents de l’administration pénitentiaire. Sur quel agent la DAP/DGAP tombera à bras raccourcis en cas d’erreur dans une matière relevant actuellement d’un magistrat formé et indépendant ?
Et concernant la création d’une inspection dédiée, durant toute la négociation de l’accord QVCT, la CFDT a demandé un renforcement des moyens humains concernant la partie inspection santé et sécurité de l’IGJ. Les inspecteurs santé et sécurité au travail ne sont pas assez nombreux .
Malgré cela la réponse a été constante : il n’y a pas les budgets pour…
Donc pas de budget pour veiller à la santé et à la sécurité des agents alors que le ministère de la Justice montre avoir les moyens de créer une inspection propre à la DAP, sous l’autorité du DAP !
Et son objet principal est bien loin de la santé et de la sécurité de nos collègues : le risque corruptif et la déontologie.
On voit que le ministère de la Justice préfère répondre aux préoccupations médiatico-politiques plutôt qu’à celles exprimées par ses agents.
Là encore de nombreuses questions non traitées :
- Quel sera l’impact de cette création sur les effectifs de l’IGJ, sur la répartition des corps au sein de l’inspection du ministère ?
- Quelle articulation avec l’IGJ ?
- Quelle articulation avec le collège de déontologie ?
- Et finalement quel besoin et quel bénéfice pour les agents ?
Et finalement, une inspection dédiée à l’administration pour quoi faire ? Quand on voit que le ministre seul décide de remplacer l’inspecteur et le conseil de discipline en limogeant un directeur de centre pénitentiaire pour satisfaire à l’appétit médiatique !
Pour la CFDT, sur ces deux projets, le compte n’y est pas ! Quand on a ce genre de moyens, on doit en faire quelque chose de concret pour les agents.
Alors que la CFDT a de grandes craintes sur les budgets d’action sociale et sur les revalorisations salariales par exemple, elle demande légitimement si l’urgence était de conduire ces projets tambours battants.
En conclusion, le seul but qui est clairement affiché est d’être à la hauteur de certains interlocuteurs en interministériel comme la direction générale de la police nationale.
En voyant tout cela, La Fontaine aurait sans doute pu écrire sa fable de « La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Bœuf ». Malheureusement nous connaissons la fin de cette fable et la CFDT ne la souhaite pas pour les agents de ce ministère.
Déclaration liminaire de la CFDT au CSM Justice du 27 novembre 2025