Déclaration liminaire CFDT du Comité social ministériel 13 février 2024

Des jeux olympiques et le ministre au CSA ministériel !     

Nous ne saurions débuter sans rendre hommage à nos collègues décédés et blessés en service, nous leur adressons toutes nos pensées ainsi qu’à leurs familles et leurs proches. Le drame survenu pour notre collègue membre des ERIS rappelle que nos missions ne s’exercent pas sans risque.

Monsieur le Ministre, la CFDT salue votre présence à cette instance que vos prédécesseurs présidaient régulièrement.

Car si au quotidien, c’est-à-dire chaque jour ou presque, nous multiplions les échanges avec les services du secrétariat général et des directions sur de très nombreux sujets, la CFDT estime qu’ils doivent être suivis d’un temps solennel au cours duquel votre engagement politique doit s’affirmer.

Premier sujet à l’ordre du jour de ce CSA ministériel : les jeux olympiques

Ne nous le cachons pas, en l’état pour un certain nombre de nos collègues nous sommes loin de la fête populaire, à l’heure actuelle les JO sont surtout synonymes de contraintes supplémentaires pour les agents.

Contraintes sur leurs congés, contraintes sur leur temps de travail, contraintes sur leurs trajets.

Pour ce qui est de l’organisation tout d’abord, nous constatons que le cadre ministériel arrive bien tardivement. S’il est louable de laisser les directions s’approprier leurs questions d’organisations propres et spécifiques, ça l’est nettement moins de laisser des services s’organiser comme ils le peuvent.

Ce sont donc de grandes disparités que nous relevons voire des inégalités entre services et entre directions (y compris parfois en matière de mobilités).

La CFDT demande une vision globale pour s’assurer de l’équité et homogénéiser ainsi les dispositions sur l’ensemble du ministère.

Il a été fièrement avancé que les JO constitueront une concorde nationale, que les agents du ministère de la justice profiteront de leur « héritage ». Mais à ce jour, nous n’avons aucune perspective concrète d’aucun avantage que pourrait en retirer l’ensemble des collègues.

Pire encore, nous mesurons actuellement le risque que cet héritage puisse se traduire par la pérennisation de dispositions moins favorables voire défavorables après la tenue de ces jeux, en matière de ressources humaines notamment.

Les restrictions sur les droits des congés lors de la période estivale ne doivent en aucun cas devenir une possibilité de gestion, y compris pour nos collègues sous statut spécial.

Avec la prime qui serait mise en place, là aussi c’est le flou artistique !

Surtout quand le ministre de l’intérieur annonce une prime supérieure à celle fixée par les services du premier ministre. La justice serait-elle moins régalienne, moins impactée, moins mobilisée ?

Et même si l’on ne parle pas du montant, les conditions d’attribution sont tout aussi floues. Les agents se souviennent de l’après COVID et des versements aléatoires et inégalitaires de la prime dédiée.

C’est une véritable question de confiance envers leur administration qui se pose.

Autre sujet des jeux olympiques, les heures supplémentaires.

Leur cadre de recours est tout aussi trouble que le fonds de la Seine où certains devront nager. 

Pour faire le travail, le ministère saura trouver les personnels mais les personnels ont-ils la garantie que leur juste rémunération saura les trouver ?

Lorsque l’on voit certaines disparités de traitement dans le paiement des heures supplémentaires liées aux émeutes urbaines, là aussi les agents peuvent légitimement douter.

Monsieur le ministre, tous les services de ce ministère sont actuellement soumis à une charge de travail conséquente et pour certains, vous évoquez des renforts temporaires, la CFDT souhaite que ces renforts soient pérennes.

Car avec des renforts temporaires, les services reposeront donc toujours sur les mêmes agents qui devront former, sans aucune reconnaissance, des agents recrutés sous le sceau de la précarité dans des bâtiments bien trop souvent inadaptés.

Des recrutements qui pèseront sur des services RH déjà en souffrance et sous dotés pour faire face au quotidien.

Bref des agents précaires qui trouveront peut-être plus intéressant d’aller travailler pour un autre employeur durant cette période où les offres d’emploi ne manqueront pas.

D’autres employeurs qui leur proposeront sans doute une meilleure attractivité avec des salaires permettant de se loger décemment dans nos métropoles où les jeux olympiques font s’emballer les tarifs hôteliers et autres loyers.

Les ressources humaines, second point à l’ordre du jour

Depuis plus d’un an que le CSA ministériel est installé, la CFDT demande une feuille de route globale. Le traitement des dossiers au fil de l’eau est un non-sens et une source d’inéquité entre les agents mais aussi de désorganisation des services.

La CFDT exige cette lisibilité et cette cohérence. La présentation de ce jour est un premier pas, un caillou plus qu’une véritable pierre à cet édifice mais notons l’effort.

Sont donc en cours de négociations :

  • un nouvel accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes
  • Un accord relatif à la qualité de vie et des conditions de travail, pour proposer des avancées concrètes en matière de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail, amélioration des pratiques managériales et des organisations du travail.

Si dans le cadre de ces deux accords les intentions du ministère sont louables, la CFDT vous rappelle le principe de réalité. Aucun accord ne pourra être concret sans moyens dédiés.

La CFDT vous l’a dit, ces sujets sont essentiels, nous ne signerons pas des accords de façade. Malheureusement ce sujet des moyens est pour l’heure esquivé.

Monsieur le Ministre nous vous demandons donc un engagement politique fort en la matière.

  • Sont également en cours les négociations relatives à la protection sociale complémentaire (PSC).

Avec notamment la participation obligatoire de l’employeur à hauteur de 50% mais avec le pendant d’en faire un régime à adhésion obligatoire. La CFDT sera vigilante à ce qu’il soit constitutif de véritables avancées pour les personnels avec une couverture sociale meilleure ne leur revenant pas plus cher qu’actuellement.

  • Concernant les agents des corps communs, en septembre 2023 la CFDT avait interpellé la Secrétaire générale, le directeur des services judiciaires, le directeur des services pénitentiaire et la directrice de la PJJ par plusieurs courriers.

Force est de constater que nos demandes répétées de prise en compte de nos collègues sont restées lettre morte.

C’est avec intérêt que nous avons noté que vous souleviez enfin ce point lors de notre dernier échange et lors de vos vœux. Nous vous demandons donc un calendrier pour ces échanges.

Car si nous reprenons les travaux concernant la création d’une filière technique ministérielle (C, B et A), rien n’était annoncé pour la filière administrative.

Et n’oublions pas que tous les corps spécifiques n’ont pas bénéficié de la revalorisation statutaire due en 2023 (directeurs des services de greffe, filière d’insertion et de probation par exemple, filière sociale etc.). 

L’année 2023 a vu des réformes importantes :

  • La réforme des greffes ouvrant enfin la catégorie A aux greffiers et permettant un plan de requalification d’adjoints administratifs en greffiers important. Pour qu’elle prenne sa pleine mesure, les discussions qui se poursuivent avec les organisations représentatives signataires sont essentielles.
  • La réforme de la filière de surveillance, qui amène le passage dans la catégorie supérieure porté depuis longtemps par la CFDT. Mais elle amène également une nouvelle vague de contractualisation avec les surveillants adjoints sur laquelle nous serons vigilants et nous saurons rappeler à la DAP ses engagements de n’y recourir qu’en cas de manque important de surveillants.

Les chantiers RH ne sont pas clos

En effet, l’exemple de l’impact du code de justice pénal des mineurs (CJPM) est révélateur de ces sujets RH non terminés.

Car si vous pouvez aujourd’hui vous réjouir de délai de procédure pénale raccourcis ça a un prix ! La DPJJ continue d’appliquer sa culture du « faire avec » en refusant de poser le constat que le temps d’audience et le temps administratif empiètent sur le temps éducatif nécessaire aux professionnels qui doivent être au contact des jeunes.

C’est le cœur même de leur mission d’accompagnement éducatif qui est remis en cause, un temps d’élaboration pour les professionnels et de réflexion pour les mineurs. Il ne s’agit donc pas de souhaiter « un cadre et des conditions de travail sereines » mais bien de s’en donner concrètement les moyens.

C’est à ce titre que la CFDT demande que les « ajustements qui seront proposés » par l’administration à l’égard du CJPM se traduisent par un arbitrage clair sur la question des normes de prise en charge dans les services de la PJJ. Cet arbitrage doit avant tout permettre de garantir la priorité donnée au temps éducatif, qui a toujours été le centre même de notre mission, et dont nous nous éloignons de plus en plus au bénéfice d’une gestion administrative.

De plus, certaines discussions structurantes doivent encore être menées en 2024 notamment celles relatives à l’organisation des juridictions.

Sujet depuis trop longtemps évité qu’il est temps de mettre sur la table et pour lequel nous souhaitons un engagement fort de votre part. Vous voulez « réformer notre justice concrètement, tangiblement » eh bien nous y sommes !

Et nous nous devons de profiter de votre présence Monsieur le ministre pour évoquer les conditions immobilières déplorables dans lesquelles une partie de nos collègues continuent d’exercer.

Vous avez indiqué que c’était un axe primordial et nous vous rejoignons car à ce rythme pour certains, ce ne sera pas la justice 0 papier en 2027 mais la justice 0 bâtiment !

Il nous faut des bâtiments dignes de ce nom pour l’image de la justice et pour accueillir les renforts d’effectifs annoncés.

Et à ce sujet nous vous engageons à ne pas oublier nos collègues ultra-marins, les attentes y sont fortes, nous avons noté avec satisfaction des annonces à venir pour nos collègues de l’administration pénitentiaire en Nouvelle Calédonie et à Mayotte. Mais il n’en va pas de même pour nos collègues de la PJJ à Mayotte qui sont encore en attente de locaux pour loger leurs unités.

Les besoins dans l’ensemble des directions demeurent immenses.

Enfin, nous souhaitons conclure cette déclaration liminaire en réaffirmant toute l’importance que la CFDT accorde à l’action sociale.

La politique d’action sociale se doit d’être forte, concrète et innovante le cas échéant.

Si le ministère de la justice veut attirer et fidéliser les agents, tous les leviers RH doivent être mis en œuvre en même temps que ceux relatifs à l’action sociale.

Sur l’ensemble de nos territoires, en métropole et outre-mer.

Si comme vous l’avez déclaré vous souhaitez que l’année 2024 soit « l’année de l’action, l’année du changement concret », la CFDT sera présente et nous souhaitons que vous le soyez également avec un engagement politique sans faille pour nos collègues et notre ministère.

Guillaume Grassaud – Titulaire
Ghislain Bonthoux – Suppléant

                               

Déclaration liminaire au CSM du 13 février 2024

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