
L’investissement des représentants CFDT en faveur de leurs collègues n’est pas relatif, il est et restera absolu et intangible
Déclaration liminaire CFDT au Comité Social Ministériel du 9 juillet 2025
Madame la Secrétaire générale représentant Monsieur le Ministre,
La CFDT souhaiterait évoquer la théorie de la relativité au ministère de la justice.
Nous allons tout d’abord l’illustrer par le concept de la vitesse de la lumière que cette théorie met en avant ;
L’exemple même de la vitesse de la lumière, ce sont les interventions de notre ministre dans les médias. Cette théorie établit que la vitesse de la lumière est la vitesse maximale de déplacement de l’information.
Encore heureux, car si ça pouvait aller plus vite, nous ne pourrions suivre tant les annonces se multiplient chaque jour dans les médias, parfois de façon prématurée et de manière certaine sans jamais aucun temps de concertation préalable.
La CFDT exige que le temps de la concertation soit respecté, c’est le moment où nous pouvons relayer la vision et les attentes des professionnels de terrain, ceux-là même qui œuvrent chaque jour au sein de ce ministère.
La vitesse de la lumière, c’est également la rapidité de certains à commenter les décisions de justice avant même d’avoir pris le temps de réfléchir.
Et pour ceux-là, la CFDT exige du ministère qu’une réponse aussi rapide du ministère intervienne systématiquement en soutien à ses personnels.
Nous pourrions également développer un autre concept, celui de la gravitation ;
Effectivement la gravitation nous est familière avec deux grandes masses qui ne cessent d’influer ou de tenter d’influer directement sur le ministère de la justice : le ministre de l’Intérieur et les médias.
Or, comme nous l’apprend le concept de la gravitation, ces masses influencent l’écoulement du temps au ministère de la justice.
Pour la CFDT, il est donc grand temps de réaffirmer notre indépendance, l’indépendance de l’institution judiciaire et de garantir aux agents les conditions de travail et le temps nécessaire sans céder à ces injonctions extérieures !
Mais le concept qui se prête le mieux à notre ministère est sans nul doute celui fondateur de l’espace-temps, en voici quelques illustrations ;
Quand on passe un examen professionnel (2ème grade des secrétaires administratifs), le temps de composition paraît toujours trop court mais semble finalement interminable quand, après avoir composé et attendu en vain les résultats, les agents apprennent tardivement, par un simple mail, que le concours est annulé et qu’ils devront composer à nouveau.
La CFDT a obtenu de l’administration la prise en charge des frais et la garantie de bénéficier des mêmes facilités de service que lors de la 1ère épreuve. C’était le moins que cette administration pouvait faire !
La durée d’une procédure
Les fameux délais de la justice décriés publiquement, pourtant ils sont directement liés au manque de moyens et aux contraintes procédurales qui s’imposent aux agents.
Car :
Oui, nous manquons encore de personnels dans les juridictions. Il faut encore recruter dans toutes les catégories (C, B et A), il faut encore former et s’en donner les moyens.
Oui, nos conditions matérielles ne sont toujours pas optimales alors qu’on nous parle de justice du 21ème siècle depuis bien trop longtemps désormais.
Oui, nous devons chaque jour nous débattre avec des réformes dont les textes sont inapplicables, ou difficilement applicables, car ils ont été travaillés hors sol sans association des agents et de leurs représentants.
Ces délais interminables pour les familles et l’opinion public s’avèrent être le résultat de ces contraintes qui s’exercent sur les agents.
Pour la CFDT, il faut cesser de ne voir la justice qu’en terme de délais et de statistiques, les agents travaillent au quotidien pour rendre une justice de qualité et non une justice de chiffres.
Pour la CFDT, chaque réforme doit être travaillée en tenant compte de la réalité du fonctionnement de nos juridictions, et non hors sol comme actuellement. Chaque réforme doit prévoir les recrutements nécessaires avec des études d’impacts réalistes.
La durée de détention
Elle aussi décriée régulièrement par voie de presse. Toujours trop courte pour une partie de l’opinion publique mais trop longue quand il s’agit de la passer sur des matelas posés au sol.
La solution absolue à la délinquance et à la criminalité que certains se plaisent à annoncer sur les plateaux télé : le durcissement des peines et de leur exécution.
Mais cette solution est bien vite rendue relative face à la réalité du terrain et la surpopulation carcérale. Ces réalités qui empêchent les personnels pénitentiaires d’exercer leurs missions dans les conditions de travail nécessaires à leur accomplissement.
Cette solution miracle est encore plus relative quand, dans le même temps l’administration met la pression sur les services d’application des peines ainsi que sur les services d’insertion et probation pour trouver des solutions à la surpopulation carcérale en souhaitant faire massivement sortir les détenus par toutes les alternatives possibles à la détention. Et bien entendu sans aucun moyen pour les services sollicités !
Pour la CFDT, ce double langage doit cesser. Il est temps de dire publiquement que nous n’avons jamais eu autant de personnes en détention et que faute de moyens, le système judiciaire ne peut assurer le suivi de ces détenus de la manière attendue par nos concitoyens.
La justice des mineurs
Et parfois, la relativité doit venir d’institutions extérieures comme pour la justice des mineurs.
Ainsi, il a fallu l’intervention du conseil constitutionnel pour contrer la volonté répressive exprimée et soutenue par notre ministère depuis des mois à l’égard des mineurs.
C’est le conseil constitutionnel, en vidant de sa substance la loi « visant à restaurer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents », qui a validé ce que nous défendions depuis longtemps malgré l’indifférence de la DPJJ : la primauté de l’éducatif et la spécificité de la justice des mineurs que ce projet visait à effacer.
La CFDT ne peut donc que dénoncer l’absence d’écoute du ministère envers ses agents, qui eux, connaissent la réalité de la justice des mineurs, et qui la vivent au quotidien.
La relativité, les agents la constatent également en matière de ressources humaines ;
Pour la mobilité : Quand pour l’administration, 18 à 24 mois c’est trop peu pour le service, dans le même temps cette durée est insupportable pour l’agent éloigné de sa famille. Ou encore, quand cette même administration multiplie les postes à entretiens ou profilés neutralisant d’autant les possibilités de mobilité des agents.
Pour la CFDT l’administration se doit donc de prendre en compte la réalité du quotidien sans se cacher derrière le totem des LDG, la mobilité fait partie du parcours professionnel des agents publics.
La formation
Pour la formation : Quand on oppose les nécessités de services ou les contraintes budgétaires à des agents qui ne peuvent même pas remplir leurs obligations en matière de formation continue obligatoire.
Ou encore quand les agents n’ont pas la possibilité de mobiliser leur compte personnel de formation (CPF) alors que chaque année ils acquièrent des droits à ce titre.
Pour la CFDT, même en période de contraintes budgétaires, les agents doivent pouvoir se former. Le ministère doit réaffirmer le caractère essentiel de la formation et y mettre les moyens nécessaires.
Pour les demandes RH du quotidien : lorsqu’il s’agit d’émettre un titre de perception, de refuser sans justification ou d’aller sur le terrain disciplinaire certains services sont bien plus réactifs que pour simplement répondre à un agent qui les interroge.
L’agent est encore bien trop souvent laissé sans réponse ou fasse à des réponses qui ne tiennent absolument pas compte de la situation de l’agent.
Pour la CFDT c’est inadmissible, tous les agents de ce ministère doivent avoir une réponse à leurs interrogations RH.
Et l’exemple doit venir du ministère lui-même, avec un secrétariat général qui diffuse et rend accessibles ses notes RH (IFSE, CIA, etc.) et répond à ses agents.
La dilatation du temps et la contraction de l’espace
Et nous terminerons avec un dernier concept de la théorie de la relativité : la dilatation du temps et la contraction de l’espace ;
Là, se sont les projets immobiliers de ce ministère pour lesquels il n’y a toujours aucune feuille de route.
Plus le temps passe, plus ils s’éloignent.
Plus le temps passe et plus les agents et détenus se trouvent contractés dans des espaces inadaptés.
Plus le temps passe, plus les coûts du projet augmentent et plus les conditions de travail des agents se dégradent.
Pour la CFDT, il est temps de remettre à plat tout ce fonctionnement et qu’enfin il y ait de la transparence dans ces projets.
La CFDT demande un débat en instance sur la feuille de route immobilière du ministère (si elle existe …).
Autre illustration incontournable en matière de dilatation du temps : les projets informatiques ;
Avec des budgets qui se sont envolés, un service du numérique devenu une direction, nous devrions avoir un développement du numérique de premier ordre.
Malheureusement il n’en est rien.
Les agents qui œuvrent chaque jour dans le domaine du numérique semblent devoir le faire :
- sans cap connu, preuve en est l’absence total de ce sujet dans nos CSA ministériel.
- sans reconnaissance, nous le voyons, à chaque soubresaut budgétaire le ministère se sépare de ses prestataires.
Mais aussi avec nos propres agents contractuels qui se trouvent dans des situations salariales inégalitaires et opaques.
Quant aux agents titulaires, la filière technique ministérielle ne pourra à elle seule apporter la reconnaissance qui leur est due vues les inégalités dont eux-mêmes souffrent au sein de cette filière du numérique.
Pourtant les promesses d’un avenir meilleur et d’applicatifs facilitants le travail des agents ont été répétées.
La réalité est que les agents doivent se débrouiller avec des applicatifs obsolètes mais assez souvent adaptés à leurs pratiques professionnelles ou passer à des applicatifs « modernes » trop souvent inadaptés à leurs pratiques et aux besoins qu’ils auraient exprimés si on leur avait demandé leur avis !
La CFDT ne peut donc que rejoindre l’insatisfaction des agents concernant le numérique.
Nous demandons à discuter des orientations poursuivies mais également des mesures salariales pour tous les agents du numérique titulaires et contractuels de l’ensemble des directions du ministère.
Bref, pour la CFDT au sein de ce ministère, tout est relatif sauf l’investissement sans faille des agents et la reconnaissance qui leur est due. Les agents méritent des réponses concrètes, des résultats tangibles et de la reconnaissance pour leur investissement.
L’investissement des représentants CFDT en faveur de leurs collègues n’est pas relatif, il est et restera absolu et intangible.
Les représentants CFDT
Guillaume Grassaud
Ghislain Bonthoux
Déclaration liminaire CFDT au Comité Social Ministériel du 9 juillet 2025