Discours d’Interco CFDT à la mobilisation du 8 mars au Panthéon
Marie Mennella, secrétaire nationale, et Julien Morcrette, secrétaire national, ont déclamé ce texte lors de la Journée des droits des femmes du 8 mars, sur la place du Panthéon. Cette mobilisation interfédérale était sous le signe des travailleuses essentielles.
CE QUE NOUS CONSTATONS
Nous voulons porter la voix de nos collègues qui n’ont pas pu venir en personne, apporter leurs témoignages.
Voici Francette qui nous dit, « Je suis aide à domicile, j’ai un contrat de deux heures par semaine mais en réalité je fais vingt heures. C’est trop peu pour le nombre de personnes à visiter alors je dépasse. J’ai eu 845 € de paie en janvier : ce n’est pas assez pour ma fille et moi. L’essence a augmenté et mes déplacements ne sont pas tous remboursés alors je gagne moins d’argent. Je suis contente d’avoir un travail mais j’aimerais gagner mieux ma vie. »
Voici Stéphanie qui explique : « Je suis en CDD comme auxiliaire de soins à temps complet dans un EHPAD public. Mon contrat est à 17h30, le reste en heures supplémentaires au bon vouloir de la collectivité. Je n’ai jamais la même paie. Durant la Covid, et même maintenant, on doit gérer des protocoles sanitaires qui changent tout le temps. On n’a plus le temps de s’occuper des personnes âgées. »
Voici Evelyne qui est Atsem et qui dit : « Je suis embauchée à temps non complet pour 24 heures durant les temps de classe mais je fais aussi la garderie et la cantine. Je travaille sans arrêt jusqu’au soir. Contrairement aux idées reçues, l’Atsem n’est pas seulement là pour « accompagner les enfants aux toilettes. J’aide les enseignantes ; je fais aussi partie de l’équipe éducative. Durant les premières heures de la Covid, j’étais présente pour les enfants des soignants. J’ai eu deux fois la Covid et mon mari aussi, alors qu’il est vulnérable. On a eu peur. Pendant la période de la Covid : la désinfection des locaux et du matériel qui a servi dans la journée, être en permanence derrière les enfants afin de s’assurer qu’ils respectent les gestes barrières ! Cela a occasionné beaucoup de fatigue et des arrêts maladie. Ce travail supplémentaire et pourtant essentiel n’est pas reconnu. »
Et Marie, greffière au ministère de la justice nous explique que : « Durant le premier confinement, les tribunaux sont restés ouverts et en première ligne face aux violences des cellules familiales. C’était difficile d’entendre dans les médias que les tribunaux étaient fermés alors que nous fonctionnions sans masque, sans gel hydroalcoolique mais avec la peur au ventre d’attraper la covid et de la transmettre à nos proches au retour du travail. » Ses collègues, Dominique et Sylvie, éducateur et psychologue à la justice, nous expliquent manquer de bras et de temps pour accompagner les jeunes dont ils sont responsables.
Le témoignage de Sophia : « Ça va faire 5 ans que j’exerce le métier de conseillère funéraire dans une grande entreprise. Avant la crise sanitaire c’était déjà compliqué : on était livrés à nous-même, le management de proximité était déjà inexistant. Pendant la crise, j’ai dû faire face à un fort surcroît d’activité, d’abord parce qu’il y avait plus de défunts, et ensuite parce qu’à plusieurs reprises j’ai porté toute seule l’agence du fait de l’absence de mes collègues. On m’a aussi imposé de nombreux remplacements dans une agence très éloignée de mon domicile et de mon lieu d’embauche habituel. À un moment, je me souviens qu’un responsable m’a même demandé de faire quatre heures de route aller/retour juste pour vérifier la température des cellules réfrigérées ! Et bien évidemment on n’a jamais demandé une telle chose à mon collègue masculin. Je n’ai eu aucun retour de ma hiérarchie, personne pour reconnaître mon investissement. »
CE QUE NOUS REVENDIQUONS
Nous travaillons pour l’amélioration des conditions d’emploi, la hausse des rémunérations, la revalorisation des grilles et le dégel du point d’indice pour tous ces métiers.
Oui, le Gouvernement a fait des annonces mais depuis le Ségur, il y a un saucissonnage et un saupoudrage des revalorisations qui les rendent incompréhensibles et injustes. Tu n’es pas dans un établissement financé au titre de l’article xx du code xx tu n’a pas le droit à la revalorisation !
Tu n’as pas le bon grade, tu n’as pas le droit à la revalorisation. Tu n’es pas dans le bon service, tu n’as pas la revalorisation alors que tu assumes les mêmes tâches !!
La CFDT veut aussi permettre l’amélioration des conditions de travail et l’anticipation de l’usure professionnelle par le développement de plan de formation, de transition ou de reconversion professionnelle. Nous revendiquons de favoriser les déroulements de carrière, d’augmenter la quotité de travail pour vivre décemment de son travail et nous dénonçons les temps non complets imposés,.
Les employeurs se plaignent du manque d’attractivité des métiers de la fonction publique : « On ne trouve plus personne ! » disent-ils. En augmentant les temps de travail des agents qui sont à temps partiel imposé, on réduirait déjà les difficultés. Ils comptent trop souvent sur l’implication et l’engagement des personnels, leur sens du service public mais cela ne justifie pas de précariser les personnels.
À la CFDT nous revendiquons du temps et des moyens humains, nous revendiquons de l’humanité, nous revendiquons des sourires, nous revendiquons du lien, nous revendiquons de faire société. Faire reconnaitre ces métiers comme essentiels c’est leur donner un salaire à la hauteur de leur utilité sociale et des conditions de travail décentes.
Interco CFDT se bat pour que les Invisibles des réformes soient entendues, pour que les invisibles de la société soient vues. Vous les avez applaudies ? Payez-les !