
Déclaration liminaire de la CFDT au CSA SJ du 15 mai 2025
Déclaration liminaire de la CFDT au CSA des services judiciaires du 15 mai 2025
Monsieur le Directeur des services judiciaires
La CFDT prend bonne note de la lettre du 11 mai 2025 adressée par le Ministre à l’ensemble des magistrats et agents en juridiction et à défaut d’un dialogue social préalable, souhaite à son tour, vous faire part de ses orientations sur les thèmes abordés.
Concernant le soutien à l’État de droit et à l’indépendance de la justice
La CFDT réaffirme son attachement aux principes de séparation des pouvoirs et d’indépendance de la justice. Elle a exprimé, dès le 18 avril 2025, son inquiétude face aux attaques ciblant magistrats et personnels judiciaires. La CFDT demande que les représentants du ministère défendent haut et fort la qualité du travail accompli au quotidien par les agents. L’État employeur a le devoir de protéger ses agents face à toute forme d’agression. La protection fonctionnelle est une obligation légale : elle doit être activée sans délai chaque fois que nécessaire.
La CFDT accueille favorablement le sujet de l’anonymisation des agents et magistrats dans les décisions accessibles en open data et souhaite participer à cette mise en place.
L’insécurité croissante ne doit pas devenir une fatalité pour les personnels de justice.
Concernant l’augmentation du budget et des effectifs du ministère de la Justice
La CFDT reconnaît les efforts budgétaires engagés depuis 2017, avec une augmentation de 48 % du budget et de 16 % des effectifs. Mais après des années de pénurie, ces progrès restent insuffisants face aux besoins du service public de la justice. Les moyens doivent continuer à croître pour répondre à l’ampleur des missions confiées.
Concernant les métiers de greffe
La CFDT a signé un accord de méthode ayant permis une valorisation du corps des greffiers. Mais les directeurs des services de greffe ont dû se mobiliser pour qu’un ministre prenne enfin l’engagement nécessaire pour reconnaître leur investissement et les revaloriser. La CFDT lui a rappelé lors du dernier CSA ministériel que nous attendons de lui qu’il pèse de tout son poids en interministériel pour respecter sa parole. Cependant la situation des agents relevant des corps communs (adjoints administratifs, adjoints techniques, secrétaires administratifs, attachés) reste un sujet non évoqué avec la DSJ. Car au-delà des plans de requalification qui permettent de revaloriser ceux qui exercent les fonctions d’un autre corps, il est essentiel de reconnaître nos collègues des corps communs qui exercent leurs missions. Les discussions en cours avec le Secrétariat général (création de la
filière technique ministérielle, revalorisation des personnels administratifs) ne sont pas suffisantes, il est nécessaire que la DSJ se saisisse enfin réellement de leur sort.
Concernant les dysfonctionnements de la justice et appel à des réformes concrètes
La CFDT reconnaît les dysfonctionnements du système judiciaire, comme les délais trop longs et la complexité des procédures, mais refuse l’idée d’une généralisation qui nierait l’engagement quotidien sans faille des agents. Nos collègues doivent faire face à des réformes mal préparées et doivent lutter avec des outils informatiques inadaptés, qui compliquent le travail au lieu de le faciliter.
Pour être concrètes et pragmatiques, les réformes doivent s’appuyer sur les retours du terrain et le dialogue social. La CFDT l’a dit et rappelé à de nombreuses reprises, l’empilement des réformes et des procédures nuit à l’efficacité du système.
Concernant la simplification de la justice civile
La CFDT n’est pas opposée à la simplification. Mais elle doit rester au service des justiciables, garantir un véritable accès au juge, et améliorer le service rendu, et pas simplement les statistiques. Notre organisation sera particulièrement vigilante à ce que cette simplification ne serve pas de prétexte à une baisse des moyens humains et matériels.
Concernant la facilitation de l’accès à la justice et numérisation
La CFDT soutient la numérisation des procédures judiciaires et le développement du Portail du justiciable, à condition que ces outils soient accessibles à tous et ne creusent pas les inégalités.
La CFDT insiste sur l’importance d’un accompagnement adapté pour les usagers et professionnels et revendique une démarche de co-construction avec les agents pour concevoir des outils réellement utiles.
En matière d’accès à la justice, le numérique ne doit pas compenser le manque de personnel, mais le compléter. Notre organisation regrette le manque de coordination entre les ministères de la Justice et de l’Intérieur pour le déploiement opérationnel de la numérisation, tant sur la faisabilité que sur les moyens humains et matériels.
Concernant la réforme de l’audiencement criminel et reconnaissance de culpabilité
L’audiencement criminel et correctionnel reste trop souvent absent des réflexions ministérielles. Il est temps d’intégrer ces réalités dans les réformes à venir.
La création d’une procédure de reconnaissance de culpabilité en matière criminelle, découverte dans la lettre ministérielle, soulève des questions majeures de droits de la défense et de place des victimes. Cette idée ne peut être lancée ainsi, la CFDT appelle à une concertation approfondie avec l’ensemble des acteurs concernés.
Concernant la clarification des peines et la réduction du nombre de sanctions pénales
La CFDT partage le constat d’un système de sanctions pénales devenu trop complexe. Elle soutient l’idée d’un travail de clarification, tout en réaffirmant l’importance de maintenir une diversité de sanctions adaptées aux réalités du terrain. Dans son avis du 3 septembre 2024, le CESE, avec le vote de la CFDT, a rappelé la nécessité de donner du sens à la peine et de favoriser la réinsertion.
Concernant le développement de l’IA et accentuer le recours au numérique
La CFDT est favorable au développement maîtrisé de l’IA, à condition qu’il s’inscrive dans un dialogue social effectif, garantissant la protection des données et le respect des métiers.
C’est donc tout naturellement que la CFDT sera attentive à la présentation des outils que vous souhaitez développer et dont vous allez nous parler aujourd’hui. L’IA est un outil, ce n’est pas la solution miracle au manque de moyens et au manque de dialogue social.
Concernant la formation des personnels et modernisation des ressources humaines
La CFDT insiste sur l’importance de la formation initiale et continue des magistrats et fonctionnaires pour accompagner les réformes. La formation est un temps nécessaire et utile pour l’ensemble de l’institution. Il est nécessaire de doter l’ensemble de nos services formation des budgets nécessaires en SAR et à l’ENG. Par ailleurs, il est désormais incontournable de mettre fin au fonctionnement en silos de nos deux écoles (ENG et ENM). Depuis de nombreuses années on nous parle d’une communauté de travail, comment la construire sans de véritables échanges en formation ?
La CFDT appelle à une modernisation de la gestion des ressources humaines des agents de greffe et magistrats. Il est désormais temps d’avoir une gestion prévisionnelle des emplois capable d’anticiper les besoins et non plus d’y réagir. Nos territoires évoluent, la justice doit être capable de suivre ces évolutions et non plus de les subir.
Concernant la lutte contre le narcotrafic et la criminalité organisée
La CFDT soutient pleinement la lutte contre le narcotrafic et la criminalité organisée. Mais cette lutte ne peut être uniquement médiatique : elle doit se faire à partir du terrain, en coordination avec tous les acteurs de la chaîne pénale. C’est la condition d’une réponse crédible, à la hauteur des réalités vécues par les professionnels et les citoyens.
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Déclaration liminaire de la CFDT CSA du 15 mai 2025