Protection judiciaire de la jeunesse : la CFDT auditionnée par l’Assemblée nationale

Audition par l'Assemblée nationale de la CFDT et du syndicat national des psychologues (SNDP) le 27 mars 2025

Le texte ci-dessous est un résumé de l’audition de la CFDT et du SNDP par l’Assemblée nationale.

Le texte complet de cette audition est à télécharger en bas de l’article.

Mission d’évaluation de la prise en charge des troubles psychiques des personnes placées sous main de justice

Pour nos débats il est essentiel de rappeler le désinvestissement financier des structures publiques de soin, comme les CMP, les lits d’hospitalisations, les CMPP. 

Nous savons que les troubles psychiques se développent aussi du fait que les prises en charge proposées à la PJJ pour ces mineurs sont de moins en moins adaptées. La PJJ a fermé de nombreuses structures. Le maillage est donc plus distendu et surtout les lieux d’accueil sont de plus en plus uniformisés.

Nous rappelons que la PJJ ne choisit pas les mineurs qu’elle accompagne mais fait face à des institutions qui les rejettent et se défaussent en argumentant que ces jeunes ne relèvent pas de leur champ de compétence. Les professionnels de la PJJ se trouvent alors dans des situations qui épuisent.

Un seul psychologue par service la plupart du temps ne permet pas d’inscrire dans une continuité tout le travail invisible d’échange avec les collègues à la suite des entretiens difficiles avec des jeunes et des familles qui bousculent émotionnellement.

Les difficultés d’accès au soin psychique pour ces jeunes est réel pour plusieurs raisons :

  • Les services de santé mentale sont particulièrement limités. Les hôpitaux de jour ont parfois disparu dans certaines régions et les lits d’accueil se comptent sur les doigts d’une main. Des jeunes qui relèvent d’hôpitaux de jour se retrouvent dans les UEAJ. Des jeunes qui relèvent de la psychiatrie se retrouvent en détention. La destruction des services publics de soin est ici au premier plan.
  • Le manque de moyens à la PJJ en psychologues et pédopsychiatre est un constat sans cesse réaffirmé.
  • Concernant les obligations de soin l’orientation vers les CMP de secteur est une gageure du fait de leur surcharge constante avec des délais d’attente qui n’ont plus aucun sens. Tandis que le temps d’écoute possible de la souffrance de l’adolescent s’est drastiquement réduit avec le temps, pour ne pas dire qu’il a même totalement disparu dans beaucoup de services, pour ne laisser place qu’à une rotation de mesures d’investigations.
  • Ainsi, concernant la place des psychologues à la PJJ, les normes de prise en charge sont déjà particulièrement incohérentes (49 MJIE par an ne représentant que la moitié de leur temps de travail). Il ne s’agit donc pas de leur en demander plus sans s’assurer que cela corresponde à une véritable augmentation des effectifs au sein des services.
  • Il est aussi important d’évoquer la question du « diagnostic». En effet, si le dogme du « pas de diagnostic avant la majorité » reste une précaution fréquente, nous pouvons faire en sorte que, même sans diagnostic, il soit possible de se réunir et de définir des objectifs communs dans la prise en charge.
  • Les MNA sont un public spécifique parmi les jeunes à la PJJ dans le sens où ces adolescents très mobiles dans l’espace, souvent pris dans des addictions fortes et en lien avec des parcours de vie traumatique ne peuvent que très rarement s’inscrire dans un parcours de soin.
  • L’accès au soin ne peut se concevoir que dans une chaine pluridisciplinaire et pluri institutionnelle où les spécificités du public accueillis à la PJJ soient mieux connues pour adapter des dispositifs au plus près des difficultés de ces jeunes.
  • Les jeunes suivis par la PJJ sont souvent sujets aux ruptures même si le soin ne fait pas défaut. En effet, les placements se succèdent parfois sans permettre une stabilisation d’une prise en charge adaptée. Le travail dans le temps est fondamental mais ne correspond plus aux contraintes administratives et budgétaires des tableaux et des tarifications à l’activité.
  • La question des addictions pose la question de l’orientation vers des services associatifs spécialisés dans ces prises en charge en addictologie qui demande tout un travail préparatoire d’accompagnement qui mobilise les différents professionnels d’un service.
  • Enfin, sur la question de la gouvernance, il serait temps d’en finir avec des feuilles de route et des « projets stratégiques » désincarnés avec des mots vides de sens. Ces documents ne permettent qu’une chose, celle de donner bonne conscience à nos institutions. La théorie n’a de sens que quand elle sert la pratique. Nous ne contestons pas la nécessité de formaliser nos interventions mais cela doit émaner des terrains et des nécessités des professionnels en lien avec les besoins des jeunes. Encore une fois, il nous semble essentiel de sortir des intérêts institutionnels pour remettre l’humain au centre.

Les rapports et études s’empilent depuis des années mais l’absence d’impulsion politique laisse la dégradation des prises en charge en santé mentale s’installer, particulièrement pour les jeunes et les familles que nous rencontrons à la PJJ.

Il existe bien un manque criant de moyens en psychologues et en pédopsychiatre à la PJJ.  Il est important de le dire pour mettre à jour les limites et les possibles des prises en charge des troubles psychiques chez les mineurs sous main de justice et ouvrir sur toutes les réflexions sur le comment travailler ensemble.

Sur l’ensemble de ces thématiques, la CFDT et le SNP continueront à œuvrer et alerter, car lorsque que les discours se focalisent sur les moyens de réprimer toujours plus sévèrement nos publics sans se poser la question de l’avenir que nous réservons à cette jeunesse, il nous semble vital de défendre un service public de la justice des mineurs doté de moyens à la hauteur des enjeux.

Audition CFDT et SNDP par l’Assemblée nationale – 29 mars 2025

 

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